Sur un banc...

La première journée de cours touchait à sa fin et Clair, qui n'avait pas encore lié connaissance avec ses camarades, décida de profiter du beau temps sur un banc du parc exposé aux doux rayons de la saison. Le dos bien droit, les jambes croisées, la tête légèrement penchée sur le côté, il lisait un recueil de nouvelles de Mérimée. Sa main libre en tournait les pages parcheminées avec une grande délicatesse, quand elle ne rabattait pas quelques mèches rebelles derrières ses oreilles. Mais, depuis quelques minutes, il restait bloqué sur la même page. Des pensées passagères l'avaient emporté ailleurs, et le pied que sa position maintenait au dessus du sol s'agitait avec une certaine nervosité.

Il ne se sentait pas bien ici. Semblable au poisson rouge dont on viderait le bocal dans la rivière, il se retrouvait projeté dans un monde qu'il connaissait mal et où il se sentait complètement vulnérable. Il n'avait aucune raison de s'inquiéter pourtant… Ce changement d'environnement ne le privait pas de ses capacités. N'avait-il pas toujours su comment s'y prendre pour gagner les faveurs des autres ? Seulement, pour cela, il avait besoin d'analyser, et, tant qu'il ne pouvait établir un portrait précis des personnes auxquelles il se trouvait confronté, il n'était pas en confiance… Là était le problème de sa nature à la fois calculatrice et pusillanime…Il réfléchissait trop, se référait trop fréquemment à la règle "à chaque acte sa conséquence", et ne se laissait jamais aller… C'était pour cela qu'il se trouvait ici… Mais, très franchement, il ne voyait pas en quoi cela pourrait y changer quelque chose… En avait-il envie lui même ? Son comportement était le seul rempart à sa faiblesse…

Et puis, outre ses problèmes "relationnels", le milieu même ne l'emballait pas… Son dortoir était triste à en pleurer, il se demandait d'ailleurs s'il pourrait essayer d'en améliorer un peu le cadre à l'avenir, les lits étaient peu confortables, les matelas trop étroits, les draps rugueux et s'il continuait à manger à la cantine il allait finir par souffrir de carences c'était sûr… Entre ce qui ne l'inspirait pas, ce qui lui semblait trop gras, ce qu'il n'aimait pas de toute façon et son végétarisme… Il devait faire un effort pourtant. Ne voulait-il pas fuir son milieu ? La décision venait de lui. Non, c'était à cause de son professeur de français qui l'avait embobiné avec ces beaux discours et qu'il avait cru en même temps qu'il avait plus ou moins cherché à le fuir… Ce souvenir le rendit encore plus mal… Enfin, le mal était fait, se dit-il pour interrompre cet enchaînement désagréable de pensées. Il ferait de son mieux, même s'il ne s'y ferait jamais complètement. C'est du moins ce qu'il pensait… Un léger soupir s'échappa de ses lèvres puis il referma son livre et contempla la couverture d'un air absent. Edition de 1867. Il aimait posséder d'anciens ouvrages… Des bruits de pas le tirèrent bientôt de son évasion et un tourna aussitôt un regard méfiant en leur direction…

[Pv avec Sibyline ?]

Sibyline sortait du cours de littérature, une première pour elle, elle lisait de temps en temps, mais jamais elle n'avait étudié cette matière. Pour ce raffraichir les neurones, elle décida de se balader dans le parc. Un jeune homme assez étrange était assis sur un banc...enfin un jeune homme... Pas vraiment sur... mais qu'importe sibyline mange de tout les pains. Et puis elle aime bien les gens étranges...

Elle s'approche lentement, de sa démarche sure et gracieuse, elle n'a jamais peur des gens, c'est à eux d'avoir peur, c'est celui qui est géné qui part... Rares sont ceux qui partent, mais pas inexistant.

Elle remarqua les longs cheveux noirs de Clair, ils étaient à l'opposé des siens: gris argentés, courts et remonté à l'aide de gel en crète. Rien de bien chocant, mais discipliné, ce qui n'était pas le cas des cheveux balayés par le vent du garçon, ou de la fille. Elle réfléchit, ah oui en cours... Clair. Ca n'était pas d'une grande aide... Mais elle paria sur garçon. Un sixième sens sûrement. Elle avait tellement l'habitude des corps d'homme qu'elle pouvait meme demasqué certain transsexuel. Si c'était une fille, et bien elle perdrait son pari avec elle même... Tampis...

Elle jeta un coup d'oeil à son reflet dans une flaque: Pantalon noir taille basse et moulant, et son étole noire, laissant largement apparaître son ventre et la courbe de ses formes...elle découvre aussi le haut de son tatouage entre les omoplates... Elle se trouve bien. Au juste milieu, ni trop sage, ni trop provocatrice....

Même à lente allure, elle finit par arriver au banc, s'assoit à côté du lecteur, et avec sa franchise naturelle entame le dialogue:

- Salut, moi c'est Sibyline-Libbie si tu te souviens, Toi c"est bien Clair non? sans "e"?

Pour une fois elle avait fait preuve de diplomatie, elle aurait pu dire directement, fille ou mec. Mais non, cette créature avait l'air trop raffiné pour répondre à une question posé si brutalement. Attendant la réponse elle posa ses yeux presques rouges dans le bleu de ceux de Clair, et sourit chaleureusement.

Une jeune fille se dirigeait vers lui, de ce pas assuré que l'on peut avoir lorsque l'on décide d'aborder une personne. Serait-ce sa première véritable rencontre de l'école ? Son regard se radoucit, même s'il concervait en lui une certaine réserve. Elle n'avait pas l'air bien dangereuse, mais la confiance qui se dégageait d'elle ne permettait pas de connaître ses intentions, et pouvait très bien le priver de cette façon insidieuse qu'il avait de dominer les gens… Mais pourquoi ne pouvait-il s'empêcher de voir un danger potentiel en toute personne ? Qu'avait-il à craindre ? Quel rôle avait-il à jouer ici ? Pas de réputation à tenir, pas de frère à parer. Et pourtant, il avait peur. Il vivait dans une peur constante. Parce qu'il était faible. Physiquement comme psychologiquement. Parce qu'un geste ou un mot de trop pouvait lui faire perdre tous ses moyens et le laisser à la merci de l'Autre. Tant de choses pouvaient le blesser, et il voulait éviter à tout prix d'affronter ses fantômes intérieurs. Il était faible, puisqu'il était lâche…

Pour une fois, il allait essayer d'être naturel… Mais quelle était sa nature ? Il avait tellement l'habitude de jouer les gentils garçons qu'il ne le savait plus…Loin de ses interrogations, la jeune fille arrivait à sa hauteur, lentement, il lui témoigna une attention plus vive. Ses réflexions se dissipèrent. Son visage lui était vaguement familier, il l'avait aperçu un peu plus tôt dans la journée, lors du cours de littérature, s'il se souvenait bien, où elle avait déclaré ne pas avoir eu beaucoup de suivit scolaire jusqu'à présent. Cela devait expliquer son âge un peu plus avancé que la moyenne… Du reste, il n'avait rien noté de particulier. Ah si ! Elle faisait parti de ces filles qui, à ce que l'on disait, avaient une plastique d'actrice de cinéma et il se laissa à penser qu'un tel physique ne devait pas être facile à porter tous les jours avec tous ces hommes qui ne pensaient qu'à soulager leur libido…

Fidèle à l'aisance qu'elle témoignait, la jeune femme s'installa à ses côtés pour lui adresser aussitôt la parole, d'une façon qu'il trouva assez directe. Il était encore trop tôt pour en arguer de quoique ce soit. Tout ce qu'il avait à dire, c'était profiter de la discussion amicale qu'elle semblait lui proposer et cesser de se torturer avec des interrogations qui n'avaient pas lieu d'être…Sa dernière question lui arracha un léger sourire, même s'il l'avait maintes fois entendue. Lorsque la demoiselle lui laissa la parole, il hocha poliment la tête et déclara chaleureusement :

- Enchanté Sibyline. – Puis, il ajouta avec un air entendu : - C'est exact, je suis Clair Defontenelle, et, si je me souviens bien – reprit-il avec un sourire - nous avons participé au même cours de littérature n'est ce pas ?

- Cool -répondit-elle calmement, fière d'avoir bien trouvé- c'est exact, on est dans le même cours... Tu as l'air d'aimé ça la littérature... Moi j'avoue que je n'y connais pas grand chose; mais je ferais ce qu'il faut pour me maintenir.
ça n'est pas trop ma spécialité.

Elle s'amusa à croiser et à decroiser ses jambes, et planta son regard ardent dans les yeux aux couleurs froides du garçon.

- Alors tu le trouves comment cet endroit? tu connais déjà des personnes? ou je suis la première?

[mesens ridicule face à ton post lol, mais je ne me pose pas de question existentielle Sad

]

[Ce n'est rien ^^, et là je ne trouve pas mes posts spécialement bons de toute façon]

Le bon accueil qu'il fit à Sibyline permit à la conversation de s'amorcer sous les meilleurs auspices. Peu avare de paroles, la jeune fille poursuivit avec une grande facilité. Le regard de Clair resta posé sur son visage d'une façon peu insistante, mais assez suffisante pour lui montrer qu'il s'intéressait à ses propos. Elle se garda de faire une remarque sur son apparence, ou, ce qui était pire à son sens, de s'y arrêter un instant avant d'enchaîner l'air de rien. Il apprécia cette indifférence, peu de gens en étaient capables. Puis, elle revint plus ou moins sur ce qu'elle avait déjà dit en cours.

- J'aime assez oui, répondit-il simplement. Il n'est jamais trop tard pour s'y intéresser tu sais, parmi les classiques, certains auteurs sauront peut-être te plaire. Et puis, tout ne peut nous réussir et, par exemple, si je me débrouille plutôt bien en littérature, ma préférence va aux sciences.

Chaque mot était soigneusement soupesé. Avant d'esquisser un portrait plus précis de son interlocuteur, Clair offrait des réponses d'une parfaite sobriété, en donnant de la façon la plus concise possible les informations demandées tout en invitant la personne à en faire autant ou s'engager dans un sujet parfaitement banal, souvent de manière détournée. Assaillir une personne de questions pouvait paraître indélicat. Les échanges qui se contentaient d'un assemblage de poncifs ne le gênait pas. Au contraire, il les trouvait reposants…
Le sujet de la conversation changea, pour un thème qui semblait intéresser davantage Sibyline… Son regard se fit plus insistant et la méfiance qu'il avait laissé de côté refit surface, laissant paraître une trace de gêne sur son visage. Attendait-elle une réaction particulière de sa part ? Il avait un mauvais pressentiment... En tout cas, il se garderait bien de répondre "non" à sa première question… Et cette question, aussi simple soit-elle, combinée à l'attitude de la jeune fille le laissa fort embarrassé :

- heu… b… Bien, mentit-il maladroitement. Enfin… Je suppose que pour un établissement publique, le confort proposé aux élèves est au-dessous… au-dessus je veux dire, de la moyenne. – Il se sentait vraiment ridicule. Sa phrase achevée, il inspira profondément et se reprit : - Mais, je n'ai pas vraiment pris de repères… Et je n'ai pas eu l'occasion de parler aux autres élèves, tu es donc la première lui.
Un sourire presque ravi effleura ses lèvres. Et comment ces premiers jours se passent pour toi ?

- Oh moi j'ai l'habitude du changement,je ne fais que ça changer. Là je sors juste d'un centre de désintox' alors ça me parait plutôt agréable ici. Et puis je ne suis ni timide ni repoussante, en général je reste rarement seule longtemps. Et puis ça n'a pas l'air très strict, le directeur à l'air d'avoir 15ans dans sa manière d'agir, il suffira de lui faire remarquer si il veut jouer à plus grand qu'il n'est...

Elle sourit et fit un clin d'oeil.

- Qui essayes tu d'entourlouper? Tu sens la bourgeoisie grande classe à plein nez, dans tes mots, tes gestes, tes vêtements... Tu m'étonnes que ça doit te paraitre au dessous de TA moyenne...
Ca ne me choque pas, en fait je m'en moque, tu peux dire que tu n'as rien vu d'aussi désué, qu'est-ce-que ça changera? le bâtiment gardera la meme forme. Inutile d'utiliser des chemins détournés avec moi, j'ai plutôt tendance à utiliser la voix principale, en plus c'est mieux, ça donne la priorité la plupart du temps.

Sibyline se rapprocha un peu du jeune homme, et elle passa ses yeux sur chacun des traits de son visage, elle n'avait jamais eu à scruter un visage de ce type, il était vraiment unique, et particulièrement étrange, elle planta ses yeux de braises dans les lagons de Clair pendant presque une minute, puis elle cligna des yeux...

Elle sourit, et pas désolée pour un sou, murmura:

- Excuse moi de mettre laissée absorbée!

[Désolé pour le retard ^^"]

Le visage serein et presque enjoué qu'il avait repris à une vitesse assez suspecte, entama une vive décomposition lorsque Sybiline répondit à sa question, posée dans l'espoir d'écarter son "cas" de la conversation. Ses traits, étirés en un masque souriant perdirent de leur tonicité, et il dut déployer de grands efforts pour ne pas revêtir un air trop choqué lorsqu'il entendit la jeune fille déclarer d'une façon complètement détachée qu'elle sortait d'un centre de désintoxication. Quoi ?! Il y en avait d'autres comme ça ? Quels types de jeunes gens allaient-ils côtoyer ? Telles furent les questions qui fusèrent aussitôt dans son esprit trop conditionné… Mais, réflexion faite, Sybiline était différente de ce qu'il aurait pu s'imaginer. Elle ne paraissait souffrir de déficience mentale ou autre… Il s'en voulait de juger l'école avec tant de réserve. Elle représentait une chance énorme pour des élèves qui, comme elle, vivaient dans des conditions difficiles…

La remarque qui suivit sur le directeur le détendit quelque peu et lui arracha un sourire amusé, bien que, finalement, il ne trouvait pas forcément rassurant que les autres élèves partagent son avis sur le manque de rigueur du directeur. Mais la suite le mit de nouveau mal à l'aise, décidément, cette conversation ne lui réussissait pas, il perdait pied trop souvent… Son visage se ferma, il l'écouta, impassible, attentif. Evidemment, son attitude ne trompait personne. Il avait comme l'impression d'être un enfant pris en faute… Que pouvait-il y faire ? L'éducation du milieu laisse des traces impossibles à effacer. Etait-il d'ailleurs près à y renoncer ? Non, certainement pas. L'évidence le frappait. Il n'avait donc pas de raison à ce qu'il essaye de cacher ce qu'il était… Oui, seulement, il ne pouvait pas en parler sans éveiller des jalousies ou susciter un certain malaise. Tous n'avaient pas la même vision des choses que Sibyline. Avec ses mots, tout semblait si simple… Il l'enviait.

- J'aimerais pouvoir penser et agir comme toi, dit-il avec un sourire en posant sur elle un regard plein de douceur avant de le tourner vers l'azur. Mais je crois que tout n'est pas à dire, même si cela nous permet de rester fidèle avec nous même, sincère avec les autres. A force d'aller tout droit, on oublie d'éviter les murs… - Malgré la légère gravité du ton, son expression demeura inchangée, toujours lisse et souriante. -
Je sais bien que je ne pourrais tromper personne. Cependant, je ne voudrais pas que quelque chose dans mes propos passe pour une mauvaise volonté d'intégration. Je ne suis pas là pour jouer les bons fils de famille et c'est à moi de m'adapter, et non aux autres de s'adapter à moi.

Il se tut, se demandant s'il devait ajouter autre chose. Non, ça devrait suffire, il n'avait aucune raison de détailler davantage… Sibyline se rapprocha de lui, et ancra à nouveau ses yeux aux siens, plus longuement qu'avant. Il n'aimait pas ça. Il n'aimait pas qu'on le fixe droit dans les yeux de cette manière là. Il ne savait jamais comment réagir. Son regard se fit fuyant, se baissait trop souvent, il n'avait aucune envie de soutenir le sien, et d'entrer dans le jeu qu'elle semblait lui imposer. Que devait-on faire dans cette situation ? Pouvait-on demander à une personne d'arrêter de vous regarder ? La réaction lui semblait stupide. Et ça durait, trop longtemps, il en avait presque un nœud dans la gorge. Sa torture dura près d'une minute. Enfin, des mots apparurent. Hélas, ils ne lui furent pas d'une grande utilité. Que voulez-vous répondre à ça ? Rien. Rien, mais, dans ce genre de situation, des réponses mécaniques franchissent nos lèvres malgré nous. Ainsi, il bredouilla vivement :

- Ah… heu… oui, ce… ce n'est rien.

Cette fois, il ne retrouva pas son sourire. La méfiance perçait son masque.

Sibyline sourit devant la gène du jeune homme, elle trouvait ça plutôt charmant.
Il parla d'adaptation... le pauvre, il allait réellement avoir du mal si il était géné par le mot désintoxication, encore plus si il n'aimait pas le charme peu discret de la demoiselle, car elle ne s'adaptait pas vraiment aux autres...

- Tu sais je ne m'adapte pas vraiment aux gens, on s'adapte à moi, biensûr je ne parle pas de la même manière à tout le monde, mais je ne camoufle pas mes intentions ni ma nature, à quoi bon... Cela finit toujours par remonter, au temps que cela se voit directement... Alors ne fait aucun effort d'intégration avec moi, soi toi, c'est beaucoup plus marrant. Et les murs se dresseront toujours de toutes façons, on se relève même si on reste un peu assomé.

La preuve, j'ai prit le mur de l'héroine, je me suis fait chier quelques mois en désintox, et hop je repars... Je crois etre la seule à avoir eu ce genre de problème, les autres sont bien trop naif pour connaitre quelque chose à cela je pense, à part peut être alathéa et Isaak... Et puis selenah aussi. Mais je ne pense pas que ça soit le genre à s'amuser à ça.

Puis elle se recula un peu de Clair, et aborda la question qui avait fait disparaître tout sourire sur le visage du garçon...

- Les yeux sont le miroirs de l'âmes... Est-ce pour ça que tu n'avais qu'une envie de cliner des yeux?

Sa voix et son regard étaient malicieux...